La critique de l'Affiche

L'avis de
Mordue
Si le titre avait piqué ma curiosité, c'est lors de la présentation de la saison avignonnaise des Béliers que j'ai été convaincue. C'est le spectacle qui a proposé l'intervention la plus originale et la plus intrigantes. Les comédiennes avaient fait un petit happening très réussi qui donnait déjà le ton. Enfin, je croyais.
Et puis je sors du spectacle. Un peu secouée. Et je me demande : comment on vend un spectacle pareil ? On va faire comme d’habitude : jouer la carte de l’honnêteté la plus totale. Et vous verrez bien, en fonction de votre propre histoire, de vos liens, de ce que vous portez ou pas, comment vous pouvez vous situer par rapport au spectacle.
L'honnêteté la plus totale me pousse a vous dire que c'est un très bon spectacle, que les trois comédiennes sont excellentes, que la mise en scène est soignée et le texte très bien fichu. Mais l’honnêteté la plus totale impose aussi une forme d’alerte. C'est peut-être le spectacle le plus réaliste que j'ai vu sur les liens familiaux - les liens familiaux détériorés, entendons-nous bien. Une pièce qui ne ment pas, qui ne cache rien de l’âpreté des relations, sans jugement, sans règlement de comptes. C’est un tour de force, porté par une écriture resserrée, millimétrée – dans les mots comme dans les gestes.
Tout est sous tension. Le fil est tendu au maximum. Enfin, au maximum, c'est ce qu'on croit. En vérité, il ne fait que se tendre encore et encore au fil de la pièce. Alors oui, parfois, on rit, car le fil est tellement tendu que le craquage n'est jamais loin. Mais ce qu'on retient surtout c'est le réalisme. Le naturel. L'authenticité. On parle de conflits, oui. Mais ce que la pièce donne à voir, c’est aussi cette chose très particulière qu’est le lien du sang. Ce lien qui ne suffit pas à créer de l’amour ou de l’harmonie, mais qui reste là. Immuable. Comme une base de souvenirs communs. De douleurs aussi. Et tout cela tient sans effet. Sans pathos. Et c'est fort.