La critique de l'Affiche

L'avis de
Mordue
Quand je réserve pour Le livre de l'intranquilité, je me sens un peu stylée. Je me dis que ça y est, le temps est venu de se confronter à Pessoa. Que je vais peut-être découvrir mon nouvel auteur fétiche. Que ce spectacle va peut-être m'ouvrir les portes d'un nouvel univers. Ça, c'est quand je réserve. Quand j'y vais, je fais moins la fière. Je doute. C'est évident que ça va être trop difficile pour moi. Si vous tapez "Le livre de l'intranquilité" dans Google, le premier lien qui sort a comme description : "Ce livre de l'intranquillité n'est pas une oeuvre facile." Je me suis prise pour qui, en fait ?
Je ne sais pas pour qui je me prends exactement mais Anne Kessler et François Marthouret, eux, ils savent exactement. Qui ils sont, qui ils ont en face, où ils vont nous amener. Ils ont la situation bien en main. Plus qu'à se laisser guider. François Marthouret arrive avec une simplicité désarmante. Simple et profond. Simple et humain. Il rend ce texte accessible. On parle de rêve et de réalité, de quotidien, de ce qu'on pense souhaiter et de ce qu'on souhaite vraiment. C'est une forme de philosophie sans jargon. On pourrait dire que c’est presque léger… La vérité, c’est que c’est juste pas lourd. C’est lucide. C’est un moment de pleine conscience.
Pessoa, c'est un peu Neo dans Matrix. Il aurait pu prendre la pilule bleue, il a pris la rouge. Il a mis son existence en perspective. Il a vu la matrice. Il a vu sa conscience - et il l'a regardée bien en face. Comme une prise de conscience de sa propre conscience. Qui ne s'est pas déjà senti enfermé dans sa vie ? Dans son quotidien ? Le livre de l'intranquilité, en tout cas l'adaptation qui nous est proposée, c'est la traduction poétique de ces pensées-là. Qui parfois sont des sensations. Et parfois ressemblent davantage à des vertiges. Beaucoup plus près de nous - de moi - que je ne l'aurais cru.