La critique de l'Affiche

L'avis de
Mordue
L'histoire de Cléopâtre - malgré mes 364 visionnages d’Astérix : Mission Cléopâtre - je ne la connais pas bien. Je n'avais qu'une chose à dire : apprenez-moi. Et je dois dire qu'ils me l'ont apprise de la meilleure des manières. Je n'ai jamais été très bonne en histoire, mais je pense que si j'avais eu Eric Bouvron comme professeur, ça se serait beaucoup mieux passé. Parce que ce spectacle, c'est un cours d'histoire un peu particulier. Un cours d'histoire vivant qui touche à tous les sens.
Ça commence comme une histoire presque intime. On découvre Cléopâtre dans sa jeunesse, dans sa famille, alors qu'elle n’est pas encore un mythe. De quoi commencer à dessiner ce personnage haut en couleurs. Puis l’histoire gonfle, et les enjeux explosent. Du personnel, on passe au politique. Parce que Cléopâtre, ce n'est pas juste Cléopâtre. C'est l'Egypte, c'est Rome, c'est un continent entier. Parce que parler de Cléopâtre, c'est aussi parler de César, de Marc Antoine et d'Octave Auguste.
Le spectacle prend alors des allures d'House of Cards. Parce qu'il y a tout, dans ce Cléopâtre : le pouvoir, les jeux d’alliances, les désirs contrariés, les trahisons ciselées Et les histoires d'amour. Le spectacle nous prend pour ne plus nous lâcher. Ce n’est pas un biopic figé, c’est une grande série chorale, avec des corps qui dansent, qui s’aiment, qui s’affrontent. Tout est chorégraphié, de la guerre au désir. On se nourrit de rebondissements, on se gave de stratégies, on se drogue de chaos. Un vrai shoot théâtral comme on les aime.
Un spectacle d'Éric Bouvron, c'est toujours un voyage. Celui-ci ne fait pas exception — mais le paysage est plus bigarré que prévu. Là où Lawrence d’Arabie nous plongeait dans une esthétique orientale immersive, ici, les repères sont plus mouvants, les influences plus variées. On retrouve sa marque de fabrique : un collectif en mouvement, des comédiens qui changent de peau d’un geste, une scénographie qui suggère plus qu’elle ne montre. Un rien devient un palais, une voile, une bataille. Et puis il y a cette musique live, inattendue, parfois pop, qui glisse sous le sable antique une pulsation contemporaine. Et soudain, impossible de savoir : si c’est le spectacle qui nous entraîne, ou nous qui battons à son tempo.