La critique de l'Affiche

L'avis de
Mordue
Je suis une immense fan des Demoiselles de Rochefort - de Jacques Demy et Michel Legrand en général, mais vraiment, pour moi, ce film est cultissime. Quand j'apprends qu'il est adapté pour la scène au Lido de Paris, les émotions se mélangent : évidemment, je veux voir ça, et en même temps, c'est tellement risqué d'adapter un tel monument. Et puis j'y vais. Persuadée que j'allais être déçue. Et très vite, je comprends que je me suis plantée : un sourire qui se dessine quand je vois apparaître le pont transbordeur culte sur la scène du Lido, les yeux qui s'humidifient en entendant l'orchestre jouer ces airs que je connais par coeur, les poils qui se hérissent à l'écoute de certains des plus beaux dialogues du cinéma français, je comprends : ils l'ont fait. Ils ont réussi. Ils ont adapté Les Demoiselles de Rochefort en comédie musicale, et c'est génial. WAOUW !
Il faut le reconnaître : c'était une super idée. Car Les Demoiselles de Rochefort portent intrinsèquement tous les codes des grands shows : c'est une histoire pleine de joie, de couleurs, de paillettes, où l'on chante l'amour et l'espoir de le rencontrer. C'est un univers pétillant, brillant, plein de légèreté et de fantaisie. Et sur la scène du Lido, tout ça prend une ampleur folle. On en prend plein les yeux. Il y a des moyens sur scène, et peut-être ne les ai-je jamais trouvés aussi précieux que ce soir-là, pour rendre hommage à ce chef-d'œuvre. Entendre un orchestre live jouer cette partition magnifique, c'est fabuleux. Ces cuivres qui remplissent la salle, cette musique qui sort enfin de l'écran pour nous envahir de joie... Parvenir à recréer certaines des transitions les plus cultes du film au moyen d'une scénographie spectaculaire, c'est fabuleux. Et les costumes ! Ces paillettes qui scintillent sous les projecteurs, ces robes qui tournent et attrapent la lumière... c'est de la pure féérie ! On retrouve exactement la folie chromatique de Demy. Ils ont osé aller jusqu'au bout du délire, et c'est magnifique.
Plus fort encore : ils parviennent à nous faire oublier les comédiens qu'on a tellement vu jouer ces répliques. Alors c'est vrai, au début, c'est étonnant de ne pas retrouver la blondeur de Jacques Perrin, mais très rapidement, ce n'est plus un sujet. L'histoire incroyable des Demoiselles prend le dessus. Et au milieu de tous ces codes de comédie musicale, l'esprit du film est là. Il y a une douce folie dans l'air. L'amour court partout dans Rochefort, léger et obsédant comme un refrain qu'on ne peut plus quitter. Et nous, on en ressort en chantant dans les rues de Paris, le cœur léger et la tête pleine de couleurs. On a retrouvé intact ce qui nous avait fait tomber amoureux du film. La magie était risquée. Elle est intacte.