La critique de l'Affiche

L'avis de
Mordue
Comme il m’intriguait, ce spectacle ! Le principe est simple : à plusieurs moments de la pièce, les comédiens vous proposent deux suites possibles. Deux chemins, deux ambiances. Les spectateurs choisissent, et se crée alors, chaque soir, sous leurs yeux, un spectacle différent de la veille.
J’adore les arbres de décision. J’adore intervenir dans des choix. Pour moi, c’est le même plaisir que quand je joue à Life is Strange ou que je regarde Bandersnatch. J’aime l’idée de rendre chaque représentation unique, j’aime l’idée de créer un vrai commun avec la salle, j’aime l’idée de ne pas savoir ce que je vais voir. Mais par-dessus tout, j’aime l’idée de jouer avec le spectacle. Après tout, c’est un peu notre mantra, chez L’Affiche. Bref, j’aime l’idée.
Entre vous et moi, si on est parfaitement honnête, Shakespeare, j'ai toujours trouvé ça compliqué. Il m'arrive régulièrement de m'y perdre - notamment dès que j'assiste à un spectacle de sa collection des Richard ou des Henri. Alors jongler avec les pièces, même si j'avais hâte, j'avais quand même un peu peur. Pas de panique : tout est fluide. Un narrateur est là pour raccrocher des wagons qui se feraient la malle. Et ce principe même de choix nous implique vraiment dans le récit. On est tellement dedans qu'on ne se rend pas toujours compte qu'on est dans du Shakespeare. Mais si, pourtant : toutes les scènes jouées sous nos yeux viennent du grand William.
Ce qui nous embarque, c'est l'ambiance dans la salle. Quelle joyeuse bande de saltimbanques ! Je n'ai pas vécu à l'époque de Shakespeare, mais j'imagine assez un esprit de troupe tel qu'il est proposé sur le plateau. Ça déborde de générosité, ça casse le quatrième mur, ça balance des clins d’œil et des vannes bien senties. On sent une vraie troupe, une vraie envie de s’amuser avec nous. Tout est jeu : le choix des scènes à suivre, évidemment, mais aussi les interactions qu'ils ont entre eux sur le plateau, les références à récupérer ici et là, les improvisations qu'on devine dans certains regards. On s’amuse, ils s’amusent, et ça fait du bien.
Ce spectacle, c’est un passeport pour Shakespeare. Pour ceux qui ne le connaissent pas, c’est une porte d’entrée ludique et joyeuse, sans prise de tête. Pour ceux qui le connaissent, c’est un terrain de jeu où tester ses connaissances et redécouvrir des textes autrement. Ici, pas besoin d’être expert pour embarquer. On joue avec Shakespeare, au lieu de le mettre sur un piédestal. Et c’est une super façon de le rendre vivant.